Ici est faite la lecture analytique d'une
partie du roman de Bel-Ami de Maupassant. Il s'agit d'un passage du
chapitre 2 de la partie I allant de "Mme Forestier couvrait Duroy d'un
regard protecteur..." à "il crut y voir une gaieté plus vive, une
malice, un encouragement." Pour voir l'extrait cliquez ici.
Guy de Maupassant
est l’un des plus célèbres écrivains français du XIXème siècle. Parti de sa
campagne normande, il va être introduit par Flaubert, son mentor, auprès
d’autres « grands » comme Zola et les frères Goncourt. Il prend part
aux rassemblements du groupe de Médan où il écrit une nouvelle. Journaliste et
auteur, Maupassant écrira plus de 300 contes et nouvelles ainsi que de très
nombreuses chroniques, deux récits de voyage et seulement six romans. Bel-Ami,
l’un des ses plus longs textes, est publié en 1885 sous forme de feuilleton
dans le journal Gil Blas. Il décrit l’ascension sociale, fulgurante, de Georges
Duroy. Dorigine modeste, il va s’élever dans l’échelle sociale grâce à son
arrivisme et son physique plaisant, comme l’indique son surnom éponyme du
titre : « Bel-Ami ».
Ici, nous allons
étudier une partie du chapitre deux présentant une partie du repas chez son ami,
ancien camarade, M. Forestier. Il s’agit du premier repas de Duroy dans le beau
monde, lui qui n’est encore qu’un simple employé de bureau. Il compte néanmoins
devenir journaliste grâce à l’appui de son ancien compagnon d’armes, Forestier,
qui lui travaille comme rédacteur politique à la Vie Française. Ce dîner est
pour lui l’occasion de rencontrer le patron de ce journal, M. Walter, et
de briller. Juste avant notre passage, il vient de s’illustrer en narrant ses
aventures à l’armée et Walter vient de lui commander une série d’articles.
Durant le passage, George Duroy exulte et ose enfin adresser la parole a sa
voisine de table, Mme de Marelle. On porte également un toast à M Walter, le
patron et a son journal. Nous allons donc essayer de nous demander en quoi ce
passage marque la première étape de l’ascension sociale de George Duroy dans un
monde différent du sien. Pour ce faire, nous nous intéresserons d’abord aux
regards que portent les différentes femmes sur George Duroy, ensuite au
ressenti et aux impressions qu’a Duroy de lui-même après son coup d’éclat. Enfin, nous verrons l’opposition qui est
faite entre le monde des hommes et celui des femmes par Maupassant.
Les femmes sont
omniprésentes depuis le début du roman et indissociable au personnage
principal, George Duroy. Les trois femmes, Mme Forestier, Mme de Marelle et
Mlle de Marelle, ont chacune un regard et une réaction très différente en
fonction de leurs expériences et de leur âge. Les regards priment sans doute
parce que Maupassant considère que les yeux
sont les fenêtres de l’âme et qu’ils reflètent beaucoup de sentiment.
Mme Forestier ouvre
le passage sur « un regard protecteur », presque maternel. Elle se
pose comme une marraine dans ses ambitions de s’élever dans l’échelle sociale.
Elle l’épaulera, le secondera et l’assistera parce qu’elle est sûre de sa
réussite future (« Toi tu réussiras »). Elle est la seule autour de
la table, hormis Charles Forestier à connaitre la situation misérable de Duroy,
pourtant elle a des yeux « toujours bienveillants » et lui lance même
un « encouragement ». Elle est, également, décrite comme une
«connaisseuse » et Maupassant nous montre déjà, qu’elle n’est pas
étrangère a la réussite de l’ancien compagnon d’arme de George Duroy,
Forestier. Pourtant, elle semble insensible aux charmes de Duroy et ses regards
ne portent aucune connotation romantique. Maupassant nous apprends dès maintenant
que Madeleine Forestier ne sera jamais vraiment conquise par son héros.
La seconde femme à intervenir est sa voisine
de table, Mme de Marelle, qui est mariée mais est venue sans son mari,
seulement accompagné de sa petite fille, Laurine. Durant la première partie du
passage, ils ne s’adressent pas la parole, ni se regardent franchement,
pourtant Mme de Marelle se tourne vers George Duroy «à plusieurs reprises»,
sans doute attirée par son physique séducteur. Un autre indice, laissé par
Maupassant, permet de nous mettre sur cette piste : il s’agit de la
comparaison entre le bijou en diamant de Mme de Marelle et une goutte d’eau. En
effet sa boucle d’oreille est présentée tremblante, comme une goutte d’eau
fraiche, irrésistiblement attirée par le sol, qui « allait se détacher et
tomber ». Plus largement, le lecteur comprend que la boucle d’oreille
n’est pas le seule à être sur le point de tomber mais plutôt que c’est Mme de
Marelle qui est sur le point de succomber aux charmes du beau George Duroy. Ce
dernier est d’ailleurs assez réciproquement attiré : il est intimidé,
« tremblant de dire une sottise ». Mais leur bref échange se conclu
assez favorablement puisque Mme de Marelle le gratifie « d’un de ces clair
regards de femmes qui pénètrent jusqu’au cœur ». Maupassant, dans ce
passage, nous fait déjà pressentir la future idylle entre Mme de Marelle et
George Duroy.
Enfin apparait la
fille de Mme de Marelle: Laurine. Elle se détache singulièrement du paysage,
« la petite fille » se détache du monde des adultes et semble servir
de relai à Maupassant pour critiquer la société mondaine de son époque. Elle ne
regarde pas du tout Duroy et garde « la tête baissé sur son
assiette » un moyen pour l’auteur de nous faire comprendre qu’elle reste
innocente. Son attitude « immobile et grave » contraste
singulièrement avec la frivolité et la superficialité de autres personnages
autour des la table, qui sont trop occuper à essayer de se faire remarquer et a
être important.
Finalement, chacune des trois femmes de ce
passage portent un jugement différent et créent des futures relations avec
George Duroy. Mme Forestier se place en protectrice, sure qu’il parviendra à
percer avec un intérêt presque professionnel. Mme de Marelle, au contraire, est
prête, à l’instar de son bijou, à tomber
dans les bras de Duroy et à devenir son amante. Laurine, elle contraste avec
toutes ces mondanités et reste très à l’écart, comme si elle ignorait même que
Duroy était présent.
Après les
différents regards des femmes autour de la table ce qui se détache,
notablement, de ce passage sont les impressions et les sentiments de George
Duroy après son coup d’éclat, notamment, pendant le toast.
Les sentiments de
Duroy nous apparaissent comme très chimériques. Mais il s’agit d’un choix de
l’auteur qui nous passe en focalisation interne ce qui donne a la description
de ce toast un point de vue tout a fait subjectif. De plus Maupassant, utilise
le conditionnel passé (« aurait vidé », « aurait mangé »)
et l’imparfait (« se sentait ») pour marquer une véritable coupure
avec la réalité. « Gris de
triomphe », il se sent comme un Hercule. Il est prêt a « mang[er] un
bœuf, étrangl[er] un lion » (référence respective au dixième et premier
travaux d’Hercule de la mythologie gréco/romaine). Se comparer à Hercule, donne
à George Duroy, l’impression que rien ne pourra arrêter son ascension. Il se
détache de toute réalité et, d’abord sent dans tous son corps « une vigueur
surhumaine », comme pour rappeler la partie animale de l’être humain. Puis
sont esprit exagère ses sensations comme le prouve les deux adjectifs
hyperboliques : « une résolution invincible » et «une
espérance infinie ». Ces impressions viennent, sans doute, de l’impression
de luxe qui se dégagent de ce toast : on sert « du vin de
Johannisberg » (vin allemand très coté) dans des « verres
bleus » (le bleu est, entre autre, le symbole de l’élévation spirituelle).
Ce sentiment de luxe et de profusion (« Il aurait de même vidé une
barrique entière ») plait à George Duroy qui a en outre l’impression d’avoir
trouvé sa place.
Cette impression
d’être « chez lui, maintenant, au milieu de ces gens » engage
chez lui une véritable renaissance. Il vient « d’y prendre position, d’y
conquérir sa place » et c’est « avec une assurance nouvelle »
qu’il ose enfin engager la discussion avec Mme de Marelle. Cette dernière
impression semble confirmée par l’auteur qui repasse en focalisation externe à
« Il était enfin chez lui ».
Ce passage marque
donc le véritable début de l’ascension de George Duroy dans l’échelle sociale.
Les femmes et leurs points de vue, dominent largement dans l’occupation de ce
passage, une manière pour Maupassant de confirmer ce qu’il annonçait dans
l’incipit : c’est grâce aux femmes qu’il va s’élever socialement. Un
initiatrice, Mme Forestier qui ouvre et conclu ce passage, persuadée que Duroy
réussira. Une amante, Mme de Marelle, déjà prête à tomber entre les bras du
personnage principal. De plus George Duroy est complètement grisé par son
triomphe et le luxe qui l’entoure se sent peu à peu, au cours du repas, comme
chez lui.
Maupassant porte,
également à travers ce passage, une critique sur la bourgeoisie de son temps.
D’abord à travers les yeux de Laurine qui reste seule face a la frivolité et la
superficialité des adultes sans doute du a la profusion d’alcool et de met
luxueux. Il critique également
l’influence du journalisme, à l’origine de ce luxe, et l’importance quasi
despotique du « Patron » qui était la norme au XIXème siècle. PS : Que vous ayez aimé ou bien que vous ayez
une remarque à faire n'hésitez pas à laisser un petit commentaire !
Waouh!quel jolie analyse j'aimerai bien fait parti de votre groupe pour améliorer mes connaissances surtout en français
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